Le 8 octobre 2024, nous avons rencontré Marianne Le Turnier au musée d’Apt
Marianne Le Turnier, doctorante au Laboratoire IPAG UMR 5274, Université Grenoble Alpes et au Laboratoire EDYTEM UMR 5204, Université Savoie Mont Blanc, étudie dans le cadre de sa thèse les pigments utilisés par les Néolithiques pour décorer les stèles comme celles découvertes à la Bastidonne dans la plaine de Trets.
Le fragment (« Bastidonne 21 ») conservé par la SERHVA dans ses collections entre dans le corpus des éléments (environ 60 en tout) qu’elle est amenée à étudier. Après un premier contact au siège de l’association où elle a pu voir et photographier ce fragment, une demande d’analyse auprès du Service régional d’archéologie PACA lui a permis de procéder à des examens plus poussés de ces stèles et de leurs pigments.
Les appareils nécessaires à ces examens ont contraint Marianne à organiser des visites ciblées dans la région d’où la rencontre convenue au musée d’Apt. Sandra Poezevara, conservatrice du musée, a accueilli l’équipe scientifique composée de Marianne Le Turnier, Bernard Schmitt, professeur et directeur de thèse de Marianne, et de Fanny Lefaucher, post-doctorante.
Plusieurs appareillages sont installés dans le local mis à disposition par le musée, afin de réaliser :
- une reconstitution en 3 dimensions des deux éléments étudiés, via un relevé photogrammétrique,
- une image hyperspectrale de l’objet dans son ensemble,
- une analyse en spectroscopie de réflectance diffuse, par une mesure ponctuelle et fine sur pigments visibles.

Photogrammétrie : une « chambre » de prise de vue (photo 1) permet le positionnement puis le déplacement de l’objet selon plusieurs axes ; lors de chaque déplacement, une série de photographies numériques est prise. Chaque série couvre la suivante à 70 % environ. Au total ce seront 700 à 800 prises de vue qui, à l’aide d’un logiciel de reconstitution en 3 volumes, donneront naissance à la vue virtuelle de l’objet dans l’espace.

Imagerie hyperspectrale : à l’aide d’un imageur hyperspectral (photo 2), un relevé spectroscopique est effectué par balayages sur la surface de l’objet. L’analyse est réalisée avec une précision de 100 à 200 micromètres, pixel par pixel ; le balayage est perpendiculaire à la face analysée de l’objet. Les courbes obtenues montrent après analyse la composition du matériau point par point de la surface.

Spectroscopie de réflectance diffuse : à l’aide d’un spectromètre muni d’une sonde fine, Marianne positionne l’extrémité de celle-ci sur un point précis de l’objet (photo 3). Elle a pu ainsi se positionner sur des restes de pigment. La courbe obtenue est la somme de plusieurs échos correspondant à autant de matériaux. Ainsi, la roche support produit une courbe qu’il faut éliminer de la courbe générale afin de retenir l’écho résultant de l’analyse du pigment, en l’occurrence il s’agit de cinabre, un minéral entrant dans la composition du pigment rouge appliqué sur la stèle.

Enfin, l’échantillon Bastidonne 21 recelant quelques belles plages de pigment rouge, Marianne a souhaité en effectuer un prélèvement infime (photo 4) afin de réaliser une analyse beaucoup plus complète et fine de ce matériau à l’aide d’un spectromètre plus précis en laboratoire.
Nous ne pouvions que donner notre accord à ce prélèvement qui permettra de compléter plus précisément cette étude des stèles de la Bastidonne sur la provenance des pigments et offrira des éléments de comparaison avec les stèles issues d’autres sites néolithiques de Provence.
Photos : Serge Girard – SERHVA